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La France, jusqu’ici relativement rétive à l’exercice professionnel réalisé à distance, s’y est brutalement convertie en mars 2020. Depuis, de nombreux salariés ont conservé cette pratique qui leur permet de limiter les interactions en se concentrant uniquement sur les plus essentielles, supprimer certaines nuisances sonores ainsi que les temps de trajets pour se rendre au bureau. A cet égard, nous pourrions penser que le fait de travailler chez soi est synonyme de productivité. Mais qu’en est-il en réalité ? Afin de savoir si le télétravail est un facteur d’optimisation de la performance des salariés, et par conséquent, des entreprises, nous nous sommes référés à différentes études et sondages menés à des fins analytiques permettant de mettre en exergue les forces et faiblesses d’un tel mode de fonctionnement.


Quels bénéfices ?

Selon le think tank réalisé par l’Institut Sapiens, la productivité des employés travaillant à distance a augmenté de 22%.

Parmi les facteurs justifiant ce constat, nous constatons une réduction des « distractions et perturbations », selon les auteurs, telles que les pauses café, les déjeuners pouvant s’éterniser, les bruits environnants ou encore les « réunions inutiles et chronophages qui nuisent à la productivité ». Le temps de trajet économisé s’est par ailleurs transformé en temps d’activité ou en temps de sommeil économisé, permettant aux salariés d’être en meilleure forme.

En fonction du nombre de salariés travaillant à domicile, il contribue également à la réduction de la surface de bureau nécessaire et aux charges de loyer ou d’amortissement. Par exemple, IBM aurait économisé environ 100 millions de dollars par an depuis que la société a mis en place le travail à domicile pour certains de ses collaborateurs. De plus, d’après une étude du cabinet Kronos datant de 2016, le télétravail génèrerait une diminution d’arrêts maladie : en moyenne 5,5 jours par an en moins, les salariés estimant être davantage en droit de répartir leur temps de travail aux horaires propices à leurs convenances.

Par extension, cette liberté stimule l’accroissement de la responsabilisation des salariés invoquée par le télétravail, ces derniers ayant une meilleure gestion de leur emploi du temps.

Perçue sous un angle sociologique, l’analyse des bienfaits du télétravail met en évidence une réduction des « dysfonctionnements managériaux », souvent source de conflit ou d’absentéisme au bureau. Néanmoins, cette tendance pourrait également s’appliquer à l’exercice de la profession en distanciel, sachant que de nombreux managers douteux de la conscience professionnelle de leurs salariés, envoient régulièrement des messages afin de s’assurer que les collaborateurs sont véritablement opérationnels. Face à ce constat mitigé, se pose alors la question des inconvénients de cette pratique.

Quels inconvénients ?

En effet, si nous soulignons les effets bénéfiques du télétravail sur les salariés, d’autres axes de recherches sociologiques plus alarmistes mettent en exergue les effets néfastes de la distance. Outre les managers suspicieux, Jean Pralong souligne la potentielle perte de temps passée à coordonner les emplois du temps de chacun, ainsi que le manquement d’informations souvent nécessaires à la compréhension et au bon déroulement d’une mission. Il cite également les tracas quotidiens relatifs à la vie familiale en restant à la maison, ainsi que les impératifs ménagers bien souvent exécutés aux heures de bureau :

« Le télétravail retire des informations aux salariés, donne lieu à moins d’interactions qu’à la machine à café ; les demandes étant plus formelles, il faut plus de temps pour les comprendre ; les pauses qu’on prend au travail déconcentrent moins que quand vous vous arrêtez de travailler pour ranger la chambre ou vider le lave-linge ».

 

Par ailleurs, d’après l’enquête Harris Interactive datant de janvier 2021, de nombreux salariés, lassés d’être tenus éloignés de leur bureau et de leurs collègues, font état de leur mal-être et soulignent une augmentation du sentiment d’isolement, de stress et d’angoisse parmi ceux qui télétravaillent.

Naturellement, le télétravail ne correspond pas à tous les profils et de fait, les gains de productivité dépendent aussi du contexte dans lequel ce télétravail est réalisé, ainsi que de la personnalité de chacun : une personne extravertie aurait tendance à préférer le présentiel face à un profil plus introverti, puisque cela implique une sociabilisation plus importante.

Source : Enquête Ifop pour la fondation Jean Jaurès, réalisée entre le 21 et le 23 mars 2020

Source : Dares, Acemo Covid

« Pour de nombreux néo-télétravailleurs ou parents télétravaillant, ce gain de productivité originel serait en fait gommé soit par la période d’adaptation à cette pratique, soit par le potentiel dérangement représenté par la garde d’enfants », précise l’Institut Sapiens.

 

Dans son étude qui revient sur l’état de l’art scientifique autour du télétravail, l’OCDE confirme par exemple que « les réunions en face-à-face sont propices à une communication plus performante que ne le sont d’autres formes d’échange à distance tels que le courrier électronique, la messagerie ou le téléphone ». On se montre ainsi plus convaincant et on mobilise davantage l’attention.

En conclusion, pour tirer les meilleurs bénéfices du télétravail sans en subir un excès d’inconvénients, il faut savoir l’utiliser à bon escient avec le bon dosage, puisque, bien qu’il soit plébiscité par les salariés, l’effet du télétravail sur la productivité et les performances des entreprises pose encore des questions dont les réponses sont mitigées.

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